Chapitre VII
Une explosion dans le parc
Il est 8h25, le jour s’est levé, un petit rayon de soleil balaye la chambre. Gillmore est allongé sur son lit, son portable à la main. Il l’agite dans tous les sens à la recherche de réseau visiblement. Ce qui semblait une explosion cette nuit l’avait interpellé et il voulait se rendre sur la toile pour voir si une info quelconque pourrait l’éclairer. Un tantinet agacé par la situation, il est habitué à surfer sur les sites d’infos et surtout de consulter les groupes de discussions auxquels il est abonné et ce dès le lever du jour, c’est un rituel. Avec un petit sentiment de frustration il sauta du lit. Rapidement il enfila ses vêtements et se dirigea vers la porte lorsqu’il entendit retentir une sirène au loin.
Traversant le jardin il profita pour jeter un œil vers le portail situé à l’entrée de la résidence. Rien de spécial pensa-t-il, pas âme qui vive, du moins pour le moment! Gillmore se dirigea maintenant vers la maison de son ami. John était réveillé également, il avait préparé un petit déjeuner. Un thé chaud, des galettes de blé dur craquantes faites maison, une gelée de fruits rouges concoctées pendant l’été lors des récoltes saisonnières. Il n’était pas courant d’utiliser du beurre, denrée devenue rare. Les producteurs de lait ayant été contraint de réduire leurs exploitations. Les surproductions et les surcoûts liés à la production de l’or blanc des années 20, avaient poussé une majeure partie des agriculteurs au dépôt de bilan et à la fermeture souvent définitive des exploitations. Seuls subsistaient quelques irréductibles dans le grand village Gaulois qu’était devenu la France. Mais ceux-là privilégiaient les circuits cours, la vente directe. Tout le monde ne pouvait pas y avoir accès. Dans les villes il fallait se contenter de sous-produits de l’industrie, des produits transformés qui n’avaient que l’apparence du beurre, mais ni le goût, ni les qualités nutritives.
Le soleil maintenant réchauffait la petite véranda attenant à la cuisine. John déposa les galettes sur la grande table en teck grisâtre et fit signe à Gill de le rejoindre. Les deux hommes se saluèrent avec un “Check” amical, cela leur rappelait le bon vieux temps, à croire qu’ils redevenaient de grands adolescents. Mais c’était si bon pour eux d’être réunis à nouveau. “As-tu passé une bonne nuit ?” demanda John. “Le lit n’est pas trop petit ?” . Gill lui répondit: “Ne t’inquiète pas j’en ai vu d’autre et crois moi la literie était super. As-tu entendu comme moi la détonation, il devait être pratiquement 5h du matin ?” . “Non” répondit John. “Tu sais depuis le départ de Karry il me faut mon “tic-tac”” . C’est comme cela que John appelait son somnifère, en référence à la célèbre pastille blanche au goût de menthe fraîche que l’on ne trouvait d’ailleurs plus nulle part.
“Je me suis réveillé en sursaut, je croyais que c’était un coup de feu, mais le bruit était plus sourd et semblait lointain” expliqua Gillmore à son ami. “J’ai l’impression que ça s’est passé tout près d’ici toutefois. Mais je me demande bien où et quoi? ” Les deux amis discutèrent ensemble un long moment à ce sujet tout en profitant de la douce chaleur qui réchauffait la véranda. Non loin de là, dans le parc, ce qui ne ressemblait plus à un pin parasol, barrait le milieu d’une allée. Deux hommes en uniforme arpentaient les allées du Parc du Château de LAVY, ils étaient arrivés quelques minutes plus tôt, probablement prévenus pas un joggeur matinal qui traversait le parc. Ils arrivaient maintenant sur le lieu du méfait. Un amas de tôles fines et longues, entremêlées avec des fils et des tubes d’acier, jonchaient le sol. L’antenne relais avait été littéralement balayé par l’explosion. L’éparpillement des restes métalliques témoignait de la puissance et de l’efficacité de l’engin utilisé pour venir à bout de l’édifice.
Gill et John avaient maintenant terminé de boire leur thé. John débarrassa la table, Gillmore lui proposa de faire la vaisselle. Il lui proposa également de faire un tour du quartier. Il avait vainement cherché à avoir du réseau ce matin et il pensait que John habitait peut-être une zone blanche. Ça sera l’occasion de trouver un point d’accès et peut-être découvrirons-t-il ce qui a causé ce bruit au milieu de leur sommeil. Gill retourna à la chambre pour faire un brin de toilettes. John lui cria: “Il n’y a pas d’eau à l’annexe, tu trouveras une douche de camping dans le jardin. L’eau est certes fraîche, mais c’est de l’eau douce filtrée.” Gill était un peu surpris mais pas trop. Il considérait que l’eau était une denrée précieuse et qu’il fallait en user avec soin et précaution. Que John lui propose d’utiliser la douche de camping ne le dérangeait pas et cela serait certainement vivifiant et revigorant.
Les deux amis étaient prêts maintenant pour leur sortie. Gill avait pris son BOB, on se sait jamais pensait-il! John quant à lui avais pris soin de prendre son appareil photo. Il était passionné et n’avait jamais cessé de prendre des photos depuis toutes ces années. Il n’avait pas grand monde avec qui les partager, mais c’était plutôt sa manière à lui, une façon de garder une trace ou de laisser une trace. C’était un peu comme son journal de bord. En parcourant ses albums virtuels stockés sur son PC on pouvait lire une histoire. On pouvait mieux connaitre son hôte et découvrir qui il était vraiment. Son travail, son œuvre témoignait de lui et de sa vie. Le portail franchit ils descendirent la rue DAPRE jusqu’au carrefour principal. Là ils se dirigèrent vers l’entrée du Parc. Le portail était grand ouvert, devant le Parc était garé un véhicule banalisé, mais sur le toit on apercevait un gyrophare bleu. Le véhicule était vide. Les occupants n’étaient certainement pas trop loin. Gill et John décidèrent de ne pas s’arrêter, ni de pénétrer dans le parc.
Ils décidèrent de faire le tour du parc, John connaissait une autre entrée, elle leur permettrait d’y accéder avec plus de discrétion. En effet le portail principal donnait sur une large et spacieuse allée qui traversait le parc de part en part. Ils ne voulaient pas croiser les hommes de loi. Non pas qu’ils avaient quelque chose à se reprocher, non, mais depuis quelques années maintenant tout contrôle faisait l’objet d’un fichage et d’une convocation ultérieure pour vérifications. Ce n’était pas le moment pensaient-ils de subir un contrôle, il ne fallait pas prendre le risque d’être associé de près ou de loin a un évènement quelconque de nature à être suspecté d’association de malfaiteurs. A quelques pas de là les enquêteurs avaient terminé leur travail et se dirigeait maintenant vers la sortie. John et Gill entendirent le véhicule démarrer, ils pressèrent le pas et s’engouffrèrent dans le parc par le portillon qui se trouvait au sud de celui-ci. Ils ne savaient pas ce qu’ils cherchaient mais aperçurent bientôt ce qui leur semblait être un arbre qui venait d’être frappé par la foudre.
Gill et John comprirent alors très vite ce qui s’était passé cette nuit. Un engin explosif était venu à bout d’une antenne 5G. Si cela les réjouissait d’une part, car ils se disaient que la lutte se poursuivaient, d’autre part Gillmore compris alors pourquoi il avait eu tant de mal a avoir du réseau ce matin. Il décida alors de prendre son téléphone et de passer en mode 4G, aussitôt les notifications lui signifièrent que le réseau était disponible, 2 barres s’était peu, mais suffisant pour envoyer et recevoir des messages. Plusieurs messages d’alerte s’affichèrent sur son portable, l’un d’entre eux émanaient du “FreeWorld“, le fameux groupe d’actions directes et concrètes. Le message disait en substance, “Une de plus, c’est une de moins !”, c’était leur signature. Gill et John échangèrent un sourire et s’en retournèrent.